Grégoire le Théologien, un des plus grands docteurs de l’Église du Christ, ne voulait pas devenir presbytre quand son vieux père, Grégoire l’Ancien, évêque de Nazianze, décida de l’impliquer dans l’administration de l’Église de Nazianze et de l’ordonner. Pourtant, le Théologien n’était déjà plus très jeune à l’époque ; il avait fait de brillantes études dans les meilleures écoles de son temps; il était parfaitement capable d’exercer le ministère presbytéral. Mais il ne voulait pas devenir prêtre et son père dut employer les moyens les plus forts pour l’y contraindre. Grégoire le Théologien fut dépité par son ordination ; il a mis du temps avant d’accepter son nouveau ministère et il s’est expliqué sur ce délai dans une magnifique homélie, prononcée à l’occasion d’une fête de Pâques, qui est aujourd’hui connu comme le Discours 2.
Grégoire cite plusieurs raisons de son refus d’embrasser le sacerdoce : son aspiration à la vie philosophique de moine, son désir de fuir les ennuis du gouvernement ecclésial, sa honte face au comportement des prêtres de son époque et puis, surtout, la crainte de l’immense responsabilité qui incombe au presbytre en tant que pasteur des âmes humaines. Grégoire le Théologien a, en effet, une vision magnifiée du ministère du prêtre : il doit, dit-il, « donner à l’âme des ailes, la ravir au monde et à la remettre à Dieu, conserver ce qui est conforme à l’image, affermir ce qui risque de ne plus lui être conforme, rétablir ce qui s’est dissipé, installer le Christ dans les cœurs par l’Esprit et, en somme faire de l’homme un Dieu, donner la béatitude céleste à celui qui a donné au ciel son allégeance » (Discours 2, 22).
Grégoire a eu peur devant cette mission incroyable. Il parlera plus tard de la « lâcheté première » ; il s’en excusera. Installer le Christ dans le cœur des hommes et les transformer en dieux : tel est l’objectif du ministère pastoral dans l’Église. Et si Grégoire a accepté une mission aussi utopique, malgré toutes ses appréhensions, c’est parce qu’il savait que cet objectif – la divinisation de l’humanité –, aussi irréaliste qu’il paraisse, est bel et bien ce que Dieu souhaite pour tout être humain et ce qu’il offre, de manière totalement gratuite, à ceux qui se tournent vers lui. La divinisation de l’homme, affirme Grégoire le Théologien, « c’est ce que veut pour nous la Loi, notre pédagogue ; c’est ce que veulent les prophètes <…> ; c’est ce que veut le Christ <…> ; c’est ce que veut cette divinité qui s’est anéantie ; c’est ce que veut la chair assumée ; c’est ce que veut ce nouveau mélange de Dieu et de l’homme où la dualité aboutit à l’unité et où l’unité introduit la dualité » (Discours 2, 23).
La foi dans cette volonté de Dieu et la conviction que la faiblesse n’est pas un obstacle pour servir le projet du Créateur ont finalement fait accepter à Grégoire le ministère presbytéral qu’il redoutait. « Je tombe à genou et je m'incline sous la forte main de Dieu, et je demande pardon pour mon inactivité et pour ma désobéissance antérieure » (Discours 2, 115). Le discours sur le sacerdoce de Grégoire le Théologien se termine par une prière que je vous propose de faire nôtre aujourd’hui, pour les pasteurs de l’Église, pour le peuple des croyants et pour nous-mêmes : « Que le Dieu de la paix, celui qui a fait que les deux soient un et qui nous a rendus les uns aux autres <…>, qui donne la parole à ceux qui annoncent de toute leur force la bonne nouvelle pour l’accomplissement de l’Évangile, affermisse lui-même notre main droite, qu’il nous guide dans sa volonté et qu’il nous prenne dans sa gloire, en étant le pasteur des pasteurs et le guide des guides, afin que nous menions paître son troupeau avec science <…>. Puisse-t-il donner lui-même puissance et force à son peuple et se présenter à lui-même un troupeau splendide, sans tache, digne du bercail d’en haut, au séjour des bienheureux, dans la splendeur des saints, pour que tous, nous disions dans son temple sa gloire, troupeau et pasteur ensemble confondus, dans le Christ Jésus, notre Seigneur, à qui appartient toute gloire dans les siècles des siècles » (Discours 2, 117).
Illustration: fresque de saint Grégoire le Théologien par Mme Émilie van Taack, sanctuaire de l'église intérieure du Séminaire orthodoxe russe d'Épinay-sous-Sénart
Grégoire cite plusieurs raisons de son refus d’embrasser le sacerdoce : son aspiration à la vie philosophique de moine, son désir de fuir les ennuis du gouvernement ecclésial, sa honte face au comportement des prêtres de son époque et puis, surtout, la crainte de l’immense responsabilité qui incombe au presbytre en tant que pasteur des âmes humaines. Grégoire le Théologien a, en effet, une vision magnifiée du ministère du prêtre : il doit, dit-il, « donner à l’âme des ailes, la ravir au monde et à la remettre à Dieu, conserver ce qui est conforme à l’image, affermir ce qui risque de ne plus lui être conforme, rétablir ce qui s’est dissipé, installer le Christ dans les cœurs par l’Esprit et, en somme faire de l’homme un Dieu, donner la béatitude céleste à celui qui a donné au ciel son allégeance » (Discours 2, 22).
Grégoire a eu peur devant cette mission incroyable. Il parlera plus tard de la « lâcheté première » ; il s’en excusera. Installer le Christ dans le cœur des hommes et les transformer en dieux : tel est l’objectif du ministère pastoral dans l’Église. Et si Grégoire a accepté une mission aussi utopique, malgré toutes ses appréhensions, c’est parce qu’il savait que cet objectif – la divinisation de l’humanité –, aussi irréaliste qu’il paraisse, est bel et bien ce que Dieu souhaite pour tout être humain et ce qu’il offre, de manière totalement gratuite, à ceux qui se tournent vers lui. La divinisation de l’homme, affirme Grégoire le Théologien, « c’est ce que veut pour nous la Loi, notre pédagogue ; c’est ce que veulent les prophètes <…> ; c’est ce que veut le Christ <…> ; c’est ce que veut cette divinité qui s’est anéantie ; c’est ce que veut la chair assumée ; c’est ce que veut ce nouveau mélange de Dieu et de l’homme où la dualité aboutit à l’unité et où l’unité introduit la dualité » (Discours 2, 23).
La foi dans cette volonté de Dieu et la conviction que la faiblesse n’est pas un obstacle pour servir le projet du Créateur ont finalement fait accepter à Grégoire le ministère presbytéral qu’il redoutait. « Je tombe à genou et je m'incline sous la forte main de Dieu, et je demande pardon pour mon inactivité et pour ma désobéissance antérieure » (Discours 2, 115). Le discours sur le sacerdoce de Grégoire le Théologien se termine par une prière que je vous propose de faire nôtre aujourd’hui, pour les pasteurs de l’Église, pour le peuple des croyants et pour nous-mêmes : « Que le Dieu de la paix, celui qui a fait que les deux soient un et qui nous a rendus les uns aux autres <…>, qui donne la parole à ceux qui annoncent de toute leur force la bonne nouvelle pour l’accomplissement de l’Évangile, affermisse lui-même notre main droite, qu’il nous guide dans sa volonté et qu’il nous prenne dans sa gloire, en étant le pasteur des pasteurs et le guide des guides, afin que nous menions paître son troupeau avec science <…>. Puisse-t-il donner lui-même puissance et force à son peuple et se présenter à lui-même un troupeau splendide, sans tache, digne du bercail d’en haut, au séjour des bienheureux, dans la splendeur des saints, pour que tous, nous disions dans son temple sa gloire, troupeau et pasteur ensemble confondus, dans le Christ Jésus, notre Seigneur, à qui appartient toute gloire dans les siècles des siècles » (Discours 2, 117).
Illustration: fresque de saint Grégoire le Théologien par Mme Émilie van Taack, sanctuaire de l'église intérieure du Séminaire orthodoxe russe d'Épinay-sous-Sénart