Homélie pour la fête de saint Clément, évêque de Rome et martyr (2012)



Homélie pour la fête de saint Clément, évêque de Rome et martyr (2012)
Saint Irénée de Lyon consacre quelques lignes à saint Clément, troisième évêque de Rome, dans son Traité contre les hérésies. Voici ce que l’évêque de Lyon dit au sujet de Clément : « Il avait vu les apôtres eux-mêmes et avait été en relations avec eux : leur prédication résonnait encore devant ses yeux. Il n’était d’ailleurs pas le seul, car il restait encore à l’époque beaucoup de gens qui avaient été instruits par les apôtres. Sous Clément, donc, un grave dissentiment se produisit chez les frères de Corinthe ; l’Église de Rome adressa alors aux Corinthiens une très importante lettre pour les réconcilier dans la paix, renouveler leur foi et leur annoncer la Tradition qu’elle avait naguère reçue des apôtres. »

Cette Lettre aux Corinthiens de saint Clément demeure un des textes chrétiens les plus anciens ; elle contient un vibrant appel à la paix et à l’unité de l’Église du Christ, l’Israël fidèle élu de Dieu. Je vous exhorte de toutes mes forces à lire cette lettre si vous ne l’avez déjà fait et aimerais vous en rappeler maintenant quelques idées principales pour célébrer ainsi la mémoire de ce grand homme apostolique.

Saint Clément dénonce avec vigueur un fléau épouvantable qui frappe le peuple de Dieu : c’est la jalousie. Elle fut certainement à l’origine de la division parmi les chrétiens de Corinthe de l’époque ; elle est encore aujourd’hui cause de bien des maux dans l’Église du Christ : « Honneur et abondance vous avaient été largement donnés, et il s’est accompli ce qui était écrit : ‘Il a mangé, il a bu, il s’est élargi, il s’est épaissi et il a regimbé, le bien-aimé’. C’est de là que sont sortis jalousie et envie, querelle et révolte, persécution et désordre, guerre et captivité. » La jalousie, dit-il, est une réaction « injuste et impie par laquelle la mort est entrée dans le monde » (3, 1-4). Il n’y a pas de place pour elle dans le chœur des chrétiens ; elle est intolérable entre les membres du corps du Christ.

En revanche, ce qui fait honneur aux croyants, ce qui est l’antidote de la jalousie, ce sont l’humilité et la douceur, deux vertus que le Christ a non seulement enseignées, mais surtout mises lui-même en pratique : « Le Christ appartient en effet à ceux qui sont humbles de cœur, non à ceux qui s’élèvent au-dessus de son troupeau. Le sceptre de la majesté de Dieu, le Seigneur Jésus-Christ, n’est pas venu avec le train de la fierté et de l’orgueil – et pourtant il le pouvait – mais avec l’humilité du cœur » (16, 1-2). Dieu attend de nous une vraie simplicité : il n’est pas bon pour un chrétien d’être compliqué, tortueux : « Compatissant en tout et prodigue de bienfaits, le Père a des entrailles envers ceux qui le craignent ; avec douceur et bonté il répand ses grâces sur ceux qui s’approchent de lui avec un cœur simple. Aussi, n’ayons pas l’âme partagée et que notre esprit ne s’enfle pas à cause de ses dons incomparables et magnifiques ! » (23, 1-2)

Il n’y a pas de raisons pour nous d’être compliqués, de nous tourmenter, de nous encombrer de vaines ambitions et de courir derrière le vent. Le dessein de Dieu est irrévocable : le monde que nous connaissons aura une fin ; avec lui périront tous nos désirs passagers, nos angoisses et nos calculs. En vérité, dit saint Clément, il sera rapide et soudain l’accomplissement du dessein de Dieu. Le Seigneur viendra bientôt, rapidement, il ne tardera pas. Et ce dessein de Dieu, c’est la résurrection de l’humanité à l’image de celle du Seigneur Jésus. « Dans cette espérance, que nos âmes s’attachent donc à Celui qui est fidèle dans ses promesses et juste dans ses jugements » (27, 1).

Comme les apôtres, comme Paul, saint Clément nous rappelle combien la miséricorde de Dieu est grande et combien son amour des hommes est parfait. Aimons donc, dit-il, notre Père bienveillant et miséricordieux qui a fait de nous sa part d’élection (29, 1). C’est lui, Dieu, qui nous justifie, c’est lui qui nous sauve et nous comble de toutes sortes de bénédictions dans son Fils bien-aimé. « Tous ont été remplis de gloire et de grandeur, non par eux-mêmes ni par leurs œuvres ni par la justice des actions qu’ils ont accomplies, mais par sa volonté. Et nous, par conséquent, qui par sa volonté avons été appelés dans le Christ Jésus, nous ne sommes pas justifiés par nous-mêmes ni par notre propre sagesse, piété ou intelligence, ni par les œuvres que nous avons accomplies dans la pureté du cœur, mais par la foi ; c’est par elle que le Dieu tout puissant a justifié tous les hommes depuis les origines » (32, 3-4).

Nous sommes justifiés par Dieu lui-même, sauvés par sa seule puissance, ressuscité par son amour. Alors, allons-nous délaisser le bien, donner libre court à nos passions et nous laisser souiller par le mal ? Serons-nous des enfants gâtés et ingrats ou bien des fils qui savent aimer leur Père, leur Dieu, d’un amour actif qui les poussent à se conformer à leur Bienfaiteur, à lui plaire. C’est à cela que Clément nous appelle : « Luttons donc afin d’être trouvé au nombre de ceux qui attendent, afin d’avoir part aux dons promis. Mais comment cela se fera-t-il, bien-aimés ? Cela se fera si notre pensée est fixée sur Dieu avec foi, si nous recherchons ce qui lui plaît et ce qui lui est agréable, si nous accomplissons ce qui convient à sa volonté irréprochable et si nous suivons le chemin de la vérité, en rejetant loin de nous toute injustice et perversité, avarice, querelles, méchancetés et fourberies, murmures et médisances, orgueil et jactance, vaine gloire et dureté pour les étrangers » (35, 4-5).

Enfin, j’aimerais vous citer la fin de cette lettre de Clément aux Corinthiens, dans l’espoir que, par son intercession, nous suivrons ses recommandations qui sont un avertissement d’actualité pour les prêtres et les évêques de nos jours : « Recevez nos recommandations et vous ne vous en repentirez pas. Par la vie de Dieu, par la vie du Seigneur Jésus-Christ et de l’Esprit Saint – la foi et l’espérance des élus – celui qui aura pratiqué sans regrets les préceptes et les commandements donnés par Dieu, avec humilité et en persévérant dans la douceur, celui-là sera rangé et compté au nombre de ceux qui sont sauvés par Jésus-Christ, par qui la gloire est à Lui dans les siècles des siècles ! »

Samedi 8 Décembre 2012
Alexandre Siniakov