Un groupe de séminaristes, accompagné du recteur du séminaire le hiéromoine Alexandre Siniakov, s'est rendu le vendredi 20 janvier 2012 à l'église Saint-Gervais-Saint-Protais à Paris, à l'invitation des Fraternités monastiques de Jérusalem qui ont la charge de cette église, parmi les plus anciennes sur les rives droites de la capitale. Cette visite s'inscrivait dans le cadre de la Semaine de prière pour l'unité des chrétiens.
A l'invitation du prieur, le frère Théophane, le hiéromoine Alexandre a prononcé une homélie, sur le passage de 1 P 2, 21-25 et le sens des souffrances volontaires du Seigneur Jésus-Christ (texte ci-dessous), aux frères et aux soeurs de la communauté, ainsi qu'aux fidèles réunis pour l'office du milieu du jour.
Les séminaristes ont ensuite partagé un repas avec les frères et les soeurs des Fraternités monastiques de Jérusalem.
Texte de l'homélie du hiéromoine Alexandre Siniakov (sur la lecture de 1 P 2, 21-25):
Chers frères et sœurs, ces paroles extraordinaires de l’apôtre Pierre sur le sens des souffrances du Christ sont adressées aux domestiques, aux esclaves, confrontés à des maîtres cruels. C’est pour les encourager à endurer avec patience les peines qui leur sont infligées injustement que l’apôtre leur livre cette magnifique réflexion sur l’abnégation du Seigneur Jésus face aux souffrances. « Si, faisant le bien, vous supportez la souffrance, c’est une grâce auprès de Dieu », dit Pierre, parce que, ajoute-t-il, « le Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un modèle afin que vous suiviez ses traces ». La passion du Seigneur est donc un modèle pour nous. En suivant les traces de notre Maître, nous devons passer par les souffrances.
Voilà une idée qui pourrait choquer un grand nombre de nos contemporains. Il n’est pas politiquement correct, dans une époque aussi hédoniste que la nôtre, de faire l’éloge de la souffrance et de la soumission. C’est à peine si l’on oserait répéter, après Pierre, que c’est la meurtrissure du Christ qui nous a sauvés. Pourtant, c’est le cœur de notre foi : nous sommes chrétiens, parce que nous croyons que voulant sauver l’homme et le ramener à la béatitude éternelle pour laquelle il avait été créé, sans porter atteinte à notre liberté, Dieu a voulu que son Fils devienne homme. Le Verbe divin a ainsi assumé non seulement notre nature avec toutes les conséquences de notre chute et de notre penchant vers le mal, mais il est allé jusqu’au bout de l’expérience du mal des hommes – lui qui était sans péché et n’avait commis aucune faute : il s’est laissé condamner par ses créatures, torturer par l’œuvre de ses mains, crucifier par ceux qu’il était venu chercher. Sur le bois, « il a porté lui-même nos fautes dans son corps, afin que, morts à nos fautes, nous vivions pour la justice ». Mis à mort par l’humanité, il est ressuscité pour élever la nature humaine auprès de la majesté de Dieu. Ainsi, il a rendu à l’homme la possibilité d’être de nouveau le temple de l’Esprit de Dieu.
Nous sommes sauvés par les souffrances et la mort du Christ. Mais était-ce vraiment le seul moyen de rétablir le lien perdu entre Dieu et l’humanité ? N’est-il pas cruel ? Pour comprendre le mystère des souffrances et de la croix du Christ, saint Philarète de Moscou, un grand évêque russe du XIXe siècle, nous propose de laisser derrière nous la cour extérieure des raisonnements humains et de pénétrer dans le Saint des saints de la sagesse de Dieu en franchissant le rideau déchiré au moment de la mort de Jésus. Lorsque vous pénétrez dans le Saint des saints des souffrances du Christ, que trouverez-vous dans l’obscurité des mystères ineffables de la miséricorde divine ? « Rien d’autre, dit saint Philarète, que l’amour saint et bienheureux du Père, du Fils et du Saint-Esprit envers le genre humain coupable et déplorable. L’amour du Père crucifie. L’amour du Fils est crucifié. L’amour de l’Esprit triomphe par la force de la croix. C’est ainsi que Dieu a aimé le monde ». Ou, comme le dit l’apôtre Jean, « à ceci nous avons connu l’amour : celui-là a donné sa vie pour nous ». En effet, « si par amour pour le monde le Père céleste livre son Fils unique, le Fils aussi, par amour pour le monde, se livre lui-même ».
Proclamer les souffrances du Christ, c’est annoncer l’immensité de l’amour de Dieu pour l’homme. Prêcher la mort du Seigneur, c’est raconter la puissance infinie du Créateur. Annoncer la résurrection de Jésus, c’est rendre à l’humanité la certitude du salut et de la béatitude éternelle. C’est le seul devoir de l’Eglise : amener tous les hommes à la connaissance de l’amour de Dieu, transmettre à toute l’humanité le message de l’apôtre Pierre : « vous étiez égarés comme des brebis, mais à présent vous êtes retournés vers le pasteur et le gardien de vos âmes ».
Cet insigne impératif de l’Eglise dont l’enjeu est le salut et le bonheur éternels de l’humanité exige toutes les forces des chrétiens qui croient sincèrement dans la mort et la résurrection du Seigneur Jésus. Nous faisons bien de prier le Maître pour que cessent les divisions scandaleuses entre ses disciples. Ces divisions sont des entraves réelles à l’annonce de la Bonne Nouvelle.
Nous qui venons tout juste d’établir le lien paradoxal entre l’amour de Dieu et les souffrances du Christ, nous qui sommes les hérauts de l’amour du Père qui crucifie, de l’amour du Fils qui assume les souffrances et de l’amour de l’Esprit qui triomphe par la force de la croix, nous sommes conscients que nous manquons d’amour les uns pour les autres, puisque nous ne parvenons pas encore à être unis autour de la même Eucharistie. Alors supplions Dieu qui a tout mis en œuvre pour nous sauver, de nous rendre dignes de l’unité à l’image de celle des trois Hypostases de l’unique et indivisible Trinité.
A l'invitation du prieur, le frère Théophane, le hiéromoine Alexandre a prononcé une homélie, sur le passage de 1 P 2, 21-25 et le sens des souffrances volontaires du Seigneur Jésus-Christ (texte ci-dessous), aux frères et aux soeurs de la communauté, ainsi qu'aux fidèles réunis pour l'office du milieu du jour.
Les séminaristes ont ensuite partagé un repas avec les frères et les soeurs des Fraternités monastiques de Jérusalem.
Texte de l'homélie du hiéromoine Alexandre Siniakov (sur la lecture de 1 P 2, 21-25):
Chers frères et sœurs, ces paroles extraordinaires de l’apôtre Pierre sur le sens des souffrances du Christ sont adressées aux domestiques, aux esclaves, confrontés à des maîtres cruels. C’est pour les encourager à endurer avec patience les peines qui leur sont infligées injustement que l’apôtre leur livre cette magnifique réflexion sur l’abnégation du Seigneur Jésus face aux souffrances. « Si, faisant le bien, vous supportez la souffrance, c’est une grâce auprès de Dieu », dit Pierre, parce que, ajoute-t-il, « le Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un modèle afin que vous suiviez ses traces ». La passion du Seigneur est donc un modèle pour nous. En suivant les traces de notre Maître, nous devons passer par les souffrances.
Voilà une idée qui pourrait choquer un grand nombre de nos contemporains. Il n’est pas politiquement correct, dans une époque aussi hédoniste que la nôtre, de faire l’éloge de la souffrance et de la soumission. C’est à peine si l’on oserait répéter, après Pierre, que c’est la meurtrissure du Christ qui nous a sauvés. Pourtant, c’est le cœur de notre foi : nous sommes chrétiens, parce que nous croyons que voulant sauver l’homme et le ramener à la béatitude éternelle pour laquelle il avait été créé, sans porter atteinte à notre liberté, Dieu a voulu que son Fils devienne homme. Le Verbe divin a ainsi assumé non seulement notre nature avec toutes les conséquences de notre chute et de notre penchant vers le mal, mais il est allé jusqu’au bout de l’expérience du mal des hommes – lui qui était sans péché et n’avait commis aucune faute : il s’est laissé condamner par ses créatures, torturer par l’œuvre de ses mains, crucifier par ceux qu’il était venu chercher. Sur le bois, « il a porté lui-même nos fautes dans son corps, afin que, morts à nos fautes, nous vivions pour la justice ». Mis à mort par l’humanité, il est ressuscité pour élever la nature humaine auprès de la majesté de Dieu. Ainsi, il a rendu à l’homme la possibilité d’être de nouveau le temple de l’Esprit de Dieu.
Nous sommes sauvés par les souffrances et la mort du Christ. Mais était-ce vraiment le seul moyen de rétablir le lien perdu entre Dieu et l’humanité ? N’est-il pas cruel ? Pour comprendre le mystère des souffrances et de la croix du Christ, saint Philarète de Moscou, un grand évêque russe du XIXe siècle, nous propose de laisser derrière nous la cour extérieure des raisonnements humains et de pénétrer dans le Saint des saints de la sagesse de Dieu en franchissant le rideau déchiré au moment de la mort de Jésus. Lorsque vous pénétrez dans le Saint des saints des souffrances du Christ, que trouverez-vous dans l’obscurité des mystères ineffables de la miséricorde divine ? « Rien d’autre, dit saint Philarète, que l’amour saint et bienheureux du Père, du Fils et du Saint-Esprit envers le genre humain coupable et déplorable. L’amour du Père crucifie. L’amour du Fils est crucifié. L’amour de l’Esprit triomphe par la force de la croix. C’est ainsi que Dieu a aimé le monde ». Ou, comme le dit l’apôtre Jean, « à ceci nous avons connu l’amour : celui-là a donné sa vie pour nous ». En effet, « si par amour pour le monde le Père céleste livre son Fils unique, le Fils aussi, par amour pour le monde, se livre lui-même ».
Proclamer les souffrances du Christ, c’est annoncer l’immensité de l’amour de Dieu pour l’homme. Prêcher la mort du Seigneur, c’est raconter la puissance infinie du Créateur. Annoncer la résurrection de Jésus, c’est rendre à l’humanité la certitude du salut et de la béatitude éternelle. C’est le seul devoir de l’Eglise : amener tous les hommes à la connaissance de l’amour de Dieu, transmettre à toute l’humanité le message de l’apôtre Pierre : « vous étiez égarés comme des brebis, mais à présent vous êtes retournés vers le pasteur et le gardien de vos âmes ».
Cet insigne impératif de l’Eglise dont l’enjeu est le salut et le bonheur éternels de l’humanité exige toutes les forces des chrétiens qui croient sincèrement dans la mort et la résurrection du Seigneur Jésus. Nous faisons bien de prier le Maître pour que cessent les divisions scandaleuses entre ses disciples. Ces divisions sont des entraves réelles à l’annonce de la Bonne Nouvelle.
Nous qui venons tout juste d’établir le lien paradoxal entre l’amour de Dieu et les souffrances du Christ, nous qui sommes les hérauts de l’amour du Père qui crucifie, de l’amour du Fils qui assume les souffrances et de l’amour de l’Esprit qui triomphe par la force de la croix, nous sommes conscients que nous manquons d’amour les uns pour les autres, puisque nous ne parvenons pas encore à être unis autour de la même Eucharistie. Alors supplions Dieu qui a tout mis en œuvre pour nous sauver, de nous rendre dignes de l’unité à l’image de celle des trois Hypostases de l’unique et indivisible Trinité.