L'enseignement de l'Église orthodoxe sur l'indissolubilité du mariage



La pratique orthodoxe d'admettre à la communion des chrétiens divorcés, par principe d'économie ou indulgence pastorale, est souvent évoquée ces jours-ci. Nous proposons donc aux lecteurs de notre site cet extrait des Fondements de la doctrine sociale de l'Église orthodoxe russe, rappelant l'enseignement orthodoxe sur l'indissolubilité du mariage:


L’Église insiste sur la fidélité des époux tout au long de leur vie et sur l’indissolubilité du mariage orthodoxe, se fondant sur les paroles du Seigneur Jésus-Christ : « Ce que Dieu a uni, l’homme ne doit point le séparer […]. Quiconque répudie sa femme – pas pour prostitution – et en épouse une autre commet un adultère, et celui qui épouse une femme répudiée commet un adultère » (Mt 19, 6 et 9). Le divorce est condamné par l’Église comme un péché car il entraîne de graves souffrances à la fois pour les époux (au moins à l’un d’eux), et plus encore pour les enfants. La situation actuelle est particulièrement inquiétante, qui voit se déchirer un nombre très important de mariages, spécialement au sein de la jeunesse. Cette situation est une véritable tragédie tant pour les personnes que pour la population.

Le Seigneur cite l’adultère comme unique cause de divorce valable, qui profane la sainteté du mariage et détruit le lien de la fidélité conjugale. En cas de conflits entre époux, l’Église se fait un devoir de mettre en œuvre tous les moyens dont elle dispose (enseignement, prière, participation aux sacrements) pour protéger l’intégrité du mariage et prévenir le divorce. Les membres du clergé sont également invités à s’entretenir avec les personnes se préparant au mariage, leur montrant l’importance et la responsabilité du pas qu’ils s’apprêtent à franchir.

Hélas, il arrive qu’à cause d’une coupable imperfection, les époux apparaissent incapables de conserver le don de la grâce reçue par eux dans le sacrement du mariage et de préserver l’unité de la famille. Dans son désir de sauver les pécheurs, l’Église leur donne la possibilité de se corriger et les admet de nouveau aux sacrements après un juste repentir.

Les lois de Byzance, qui furent édictées par des empereurs chrétiens et n’encoururent pas la condamnation de l’Église, admettaient plusieurs causes de divorce. Dans l’Empire russe, la dissolution du mariage sur le fondement des lois existantes était prononcée par un tribunal ecclésiastique.

En 1918, le concile local de l’Église orthodoxe russe, dans sa Constitution sur les motifs de dissolution de l’union matrimoniale consacrée par l’Église reconnaissait comme motifs valables de divorce, en plus de l’adultère et du remariage de l’un des époux, l’abandon de l’orthodoxie par l’époux ou l’épouse, les vices contre-nature, l’incapacité à la cohabitation conjugale, apparue dès avant le mariage ou résultat d’une mutilation volontaire, la lèpre et la syphilis, l’absence prolongée sans nouvelles, la condamnation associée à la privation de tous les droits, l’atteinte à la vie ou à la santé du conjoint ou des enfants, le proxénétisme, l’utilisation du corps d’un des époux à des fins lucratives, les maladies psychiatriques incurables et l’abandon volontaire de l’un des époux par l’autre. À cette liste de motifs de dissolution du mariage, il faut ajouter à notre époque le SIDA, l’alcoolisme chronique et la toxicomanie médicalement attestés, l’avortement effectué par la femme sans l’accord du mari.

Pour l’éducation spirituelle des fiancés et afin de contribuer à l’affermissement des liens conjugaux, les prêtres sont invités à expliquer aux fiancés de façon détaillée, au cours de conversations précédant la célébration du sacrement du mariage, l’indissolubilité de l’union matrimoniale célébrée à l’église, en soulignant que le divorce ne peut être admis que comme mesure extrême en cas d’actes de la part d’un des époux définis par l’Église comme motifs valables de divorce. L’Église ne peut consentir à la dissolution d’un mariage pour satisfaire la concupiscence ou pour « ratifier » le divorce civil. Par ailleurs, lorsque l’échec du mariage est un fait, en particulier lorsque les conjoints résident séparément, et que la restauration de la famille se révèle impossible, le divorce ecclésiastique peut être prononcé à titre d’indulgence pastorale. L’Église n’encourage en aucun cas le remariage. Néanmoins, après un divorce légitime prononcé par l’Église, conformément au droit canonique, un second mariage est autorisé à l’époux innocent. Le second mariage n’est autorisé aux personnes par la faute desquelles le premier mariage avait échoué et été dissous, qu’à condition qu’elles se repentent et s’acquittent de la pénitence donnée conformément aux règles canoniques. Dans les cas exceptionnels où est autorisé un troisième mariage, la durée de la pénitence est majorée, conformément aux règles de saint Basile le Grand.

Le Saint-Synode de l’Église orthodoxe russe, dans sa résolution du 28 décembre 1998, a condamné le comportement des directeurs spirituels qui « interdisent à leurs fidèles de conclure un second mariage sous prétexte que l’Église interdirait le second mariage ; qui interdisent aux couples le divorce alors que, pour une raison ou une autre, la vie familiale devient impossible aux époux ». Par ailleurs, le Saint-Synode a demandé de « rappeler aux pasteurs que l’Église orthodoxe, dans son attitude à l’égard du remariage, suit les paroles de l’apôtre Paul : ‘Es-tu lié à une femme ? Ne cherche pas à rompre. N’es-tu pas lié à une femme ? Ne cherche pas de femme. Si cependant tu te maries, tu ne pêches pas ; et si une jeune fille se marie, elle ne pêche pas […]. La femme demeure liée à son mari aussi longtemps qu’il vit ; mais si le mari meurt, elle est libre d’épouser qui elle veut, dans le Seigneur, seulement ’ » (1 Co 7, 27-28 et 39).


Les Fondements de la doctrine sociale de l'Église orthodoxe russe, Paris, 2007, p. 116-119
L'enseignement de l'Église orthodoxe sur l'indissolubilité du mariage

Samedi 11 Octobre 2014
Alexandre Siniakov