Épinay-sous-Sénart, le 29 juin 2013
« Je pense que tous les hommes de bon sens sont d’accord avec moi pour reconnaître que l’apprentissage est le premier des biens qui sont à notre disposition. Il ne s’agit pas seulement de cette éducation pleine de noblesse qui est la nôtre, et qui dédaigne élégance et recherche de langage pour ne s’attacher qu’au salut et à la beauté des idées. Cela concerne également l’éducation du dehors, que la majorité des chrétiens rejettent avec dégoût, la jugeant insidieuse, dangereuse et propre à nous écarter de Dieu, ce qui constitue une erreur de jugement » (Or. 43, 11).
Ces paroles sont de saint Grégoire de Nazianze, le Théologien, un des plus illustres Pères de l’Église qui a fait ses études à l’Académie d’Athènes, école païenne fondée par Platon, où il a appris les lettres, les mathématiques, la rhétorique, la musique, les arts et la physique de la bouche des professeurs aussi hostiles au christianisme que certains de ceux qu’on rencontre parfois dans nos universités publiques. Cette formation au cœur même de la Grèce païenne, au centre de la civilisation humaine de l’époque a contribué à ce qu’il devienne un des plus grands témoins du Dieu-Trinité non seulement pour ses contemporains, mais aussi pour les générations suivantes des chrétiens.
Cette approche de l’éducation, consistant à s’initier à toute forme de science et à tous les savoirs des hommes de son temps, indépendamment de leur attitude envers l’Évangile, pour en tirer le meilleur et le mettre ensuite au service de la mission apostolique, fut celle de Grégoire le Théologien, de Basile de Césarée, de Grégoire le Thaumaturge, enfin de la plupart des docteurs de l’Église de cette grande époque charnière entre la civilisation gréco-romaine et la civilisation chrétienne byzantine. C’est l’approche, qu’à notre humble niveau nous essayons de cultiver dans notre Séminaire Sainte-Geneviève qui, lui aussi, fut fondé il y a quatre ans, non seulement à une époque de transition entre la société chrétienne et le monde post-chrétien, mais aussi à la charnière entre la culture française et la culture russe.
Ayant devant les yeux l’exemple des grands Cappadociens, nous avons souhaité ouvrir la formation de nos séminaristes au monde contemporain : nous les avons envoyés étudier dans des universités parisiennes, tout en leur proposant un cadre de vie liturgique et spirituel orthodoxe au séminaire. Ainsi, l’éducation chrétienne, pleine de noblesse évangélique, qui est la nôtre, est complétée par la formation au dehors, considérée à tort comme insidieuse, mais qui, en réalité, est le moyen le plus efficace de renforcer sa propre foi.
À la fin de cette quatrième année d’existence du séminaire, malgré toutes les difficultés que nous avons rencontrées, nous pouvons dire que cette approche fonctionne. Elle porte désormais des fruits. Cette année cinq de nos séminaristes terminent leur master à l’École pratique des hautes études et à l’Université Paris-Sorbonne. Il s’agit de Victor Smirnov, d’Alexey Vlasov, d’Ion Dimitrov, de Georgy Babayan et du diacre Vladimir Mutin. Trois d’entre eux ont déjà soutenu brillamment leur mémoire de master à l’École pratique des hautes études. Nous les en félicitons de tout cœur ! Les deux autres soutiendront en septembre. Un autre séminariste – Anton Sidenko – a terminé, avec de très bons résultats, sa licence de philosophie à l’Université Paris-Sorbonne. Forts de cette expérience, exceptionnelle pour les séminaristes de leur génération, ils sont désormais prêts à être investis d’une mission dans l’Église.
Les étudiants de l’année propédeutique – préparatoire – ont expérimenté cette année une grande nouveauté: ils ont suivi le programme « Laïcité, religions, interculturalité », dispensé dans le cadre de la Faculté des sciences sociales et économiques de l’Institut catholique de Paris. L’objectif de ce programme est de les initier à l’histoire et à l’état actuel des rapports entre les religions et l’État en France. Après une année de formation – où ils ont côtoyé des représentants d’autres religions, notamment des musulmans – après avoir passé des examens et présenté un mémoire écrit, ils obtiennent un diplôme particulier, reconnu par l’État français. Cette expérience s’est révélée un vrai succès. Nous souhaiterions beaucoup la poursuivre dans les années qui viennent.
L’accueil des jeunes gens venus des diocèses, des séminaires et des académies de théologie de l’Église orthodoxe russe fonctionne désormais bien dans notre séminaire. Grâce à la générosité de nos bienfaiteurs (en particulier de Mme Irina Abramovich), nous avons la possibilité de les recevoir dans de très bonnes conditions. Grâce au dévouement de nombreux bénévoles, nous pouvons, dans des délais assez brefs, leur enseigner le français ou les aider à le perfectionner. Grâce à la tradition d’accueil des universités parisiennes, nous avons la possibilité de leur offrir une formation du haut niveau intellectuel. Grâce à l’amitié avec des orthodoxes d’autres juridictions, des catholiques et des protestants, nous pouvons leur faire découvrir l’expérience de chrétiens d’autres Églises. La vie liturgique et communautaire du séminaire leur permet, en même temps, de rester bien ancrés dans leur propre tradition, de l’approfondir même, de garder le Christ au centre de leur vie et de leurs désirs.
Mais nous avons désormais d’autres défi : celui de développer l’accueil des jeunes gens, souhaitant devenir prêtres, mais venant des pays occidentaux et n’ayant pas eu l’opportunité d’étudier dans un séminaire orthodoxe. Nous n’avons pas toujours la possibilité de les envoyer se former dans des pays orthodoxes, il convient donc de chercher les moyens de leur permettre de vivre leur vocation au sacerdoce dans le contexte de l’Europe occidentale. Sous la sage direction de l’évêque Nestor de Chersonèse, notre Conseil de formation a décidé, à partir de l’année prochaine, d’ouvrir un cycle de formation pastorale, d’une durée de deux ans, destiné à la formation préalable des étudiants n’ayant aucune formation de séminariste. Après ce cycle théologique, composé uniquement de cours en interne au séminaire et devant procurer au candidat une base solide en théologie orthodoxe, les séminaristes poursuivront ensuite dans la formation habituelle de notre école: à savoir, l’étude dans une des universités de Paris, complétée par des cours internes au séminaire.
Pour finir, j’aimerais vous remercier, chers amis, de venir nous soutenir en cette fin de l’année académique. Votre amitié et vos prières nous sont extrêmement précieuses. Votre soutien nous est vraiment nécessaire. Sachez que vous êtes toujours dans nos cœurs et dans nos prières. Puisse le Seigneur nous bénir tous. Puisse-t-il, par les prières de sa Mère très pure, de saint Martin le Confesseur, de sainte Geneviève de Paris, garder dans la paix ce séminaire et le faire grandir pour le bien de l’Église du Christ.
Hiéromoine Alexandre Siniakov, recteur du Séminaire.
« Je pense que tous les hommes de bon sens sont d’accord avec moi pour reconnaître que l’apprentissage est le premier des biens qui sont à notre disposition. Il ne s’agit pas seulement de cette éducation pleine de noblesse qui est la nôtre, et qui dédaigne élégance et recherche de langage pour ne s’attacher qu’au salut et à la beauté des idées. Cela concerne également l’éducation du dehors, que la majorité des chrétiens rejettent avec dégoût, la jugeant insidieuse, dangereuse et propre à nous écarter de Dieu, ce qui constitue une erreur de jugement » (Or. 43, 11).
Ces paroles sont de saint Grégoire de Nazianze, le Théologien, un des plus illustres Pères de l’Église qui a fait ses études à l’Académie d’Athènes, école païenne fondée par Platon, où il a appris les lettres, les mathématiques, la rhétorique, la musique, les arts et la physique de la bouche des professeurs aussi hostiles au christianisme que certains de ceux qu’on rencontre parfois dans nos universités publiques. Cette formation au cœur même de la Grèce païenne, au centre de la civilisation humaine de l’époque a contribué à ce qu’il devienne un des plus grands témoins du Dieu-Trinité non seulement pour ses contemporains, mais aussi pour les générations suivantes des chrétiens.
Cette approche de l’éducation, consistant à s’initier à toute forme de science et à tous les savoirs des hommes de son temps, indépendamment de leur attitude envers l’Évangile, pour en tirer le meilleur et le mettre ensuite au service de la mission apostolique, fut celle de Grégoire le Théologien, de Basile de Césarée, de Grégoire le Thaumaturge, enfin de la plupart des docteurs de l’Église de cette grande époque charnière entre la civilisation gréco-romaine et la civilisation chrétienne byzantine. C’est l’approche, qu’à notre humble niveau nous essayons de cultiver dans notre Séminaire Sainte-Geneviève qui, lui aussi, fut fondé il y a quatre ans, non seulement à une époque de transition entre la société chrétienne et le monde post-chrétien, mais aussi à la charnière entre la culture française et la culture russe.
Ayant devant les yeux l’exemple des grands Cappadociens, nous avons souhaité ouvrir la formation de nos séminaristes au monde contemporain : nous les avons envoyés étudier dans des universités parisiennes, tout en leur proposant un cadre de vie liturgique et spirituel orthodoxe au séminaire. Ainsi, l’éducation chrétienne, pleine de noblesse évangélique, qui est la nôtre, est complétée par la formation au dehors, considérée à tort comme insidieuse, mais qui, en réalité, est le moyen le plus efficace de renforcer sa propre foi.
À la fin de cette quatrième année d’existence du séminaire, malgré toutes les difficultés que nous avons rencontrées, nous pouvons dire que cette approche fonctionne. Elle porte désormais des fruits. Cette année cinq de nos séminaristes terminent leur master à l’École pratique des hautes études et à l’Université Paris-Sorbonne. Il s’agit de Victor Smirnov, d’Alexey Vlasov, d’Ion Dimitrov, de Georgy Babayan et du diacre Vladimir Mutin. Trois d’entre eux ont déjà soutenu brillamment leur mémoire de master à l’École pratique des hautes études. Nous les en félicitons de tout cœur ! Les deux autres soutiendront en septembre. Un autre séminariste – Anton Sidenko – a terminé, avec de très bons résultats, sa licence de philosophie à l’Université Paris-Sorbonne. Forts de cette expérience, exceptionnelle pour les séminaristes de leur génération, ils sont désormais prêts à être investis d’une mission dans l’Église.
Les étudiants de l’année propédeutique – préparatoire – ont expérimenté cette année une grande nouveauté: ils ont suivi le programme « Laïcité, religions, interculturalité », dispensé dans le cadre de la Faculté des sciences sociales et économiques de l’Institut catholique de Paris. L’objectif de ce programme est de les initier à l’histoire et à l’état actuel des rapports entre les religions et l’État en France. Après une année de formation – où ils ont côtoyé des représentants d’autres religions, notamment des musulmans – après avoir passé des examens et présenté un mémoire écrit, ils obtiennent un diplôme particulier, reconnu par l’État français. Cette expérience s’est révélée un vrai succès. Nous souhaiterions beaucoup la poursuivre dans les années qui viennent.
L’accueil des jeunes gens venus des diocèses, des séminaires et des académies de théologie de l’Église orthodoxe russe fonctionne désormais bien dans notre séminaire. Grâce à la générosité de nos bienfaiteurs (en particulier de Mme Irina Abramovich), nous avons la possibilité de les recevoir dans de très bonnes conditions. Grâce au dévouement de nombreux bénévoles, nous pouvons, dans des délais assez brefs, leur enseigner le français ou les aider à le perfectionner. Grâce à la tradition d’accueil des universités parisiennes, nous avons la possibilité de leur offrir une formation du haut niveau intellectuel. Grâce à l’amitié avec des orthodoxes d’autres juridictions, des catholiques et des protestants, nous pouvons leur faire découvrir l’expérience de chrétiens d’autres Églises. La vie liturgique et communautaire du séminaire leur permet, en même temps, de rester bien ancrés dans leur propre tradition, de l’approfondir même, de garder le Christ au centre de leur vie et de leurs désirs.
Mais nous avons désormais d’autres défi : celui de développer l’accueil des jeunes gens, souhaitant devenir prêtres, mais venant des pays occidentaux et n’ayant pas eu l’opportunité d’étudier dans un séminaire orthodoxe. Nous n’avons pas toujours la possibilité de les envoyer se former dans des pays orthodoxes, il convient donc de chercher les moyens de leur permettre de vivre leur vocation au sacerdoce dans le contexte de l’Europe occidentale. Sous la sage direction de l’évêque Nestor de Chersonèse, notre Conseil de formation a décidé, à partir de l’année prochaine, d’ouvrir un cycle de formation pastorale, d’une durée de deux ans, destiné à la formation préalable des étudiants n’ayant aucune formation de séminariste. Après ce cycle théologique, composé uniquement de cours en interne au séminaire et devant procurer au candidat une base solide en théologie orthodoxe, les séminaristes poursuivront ensuite dans la formation habituelle de notre école: à savoir, l’étude dans une des universités de Paris, complétée par des cours internes au séminaire.
Pour finir, j’aimerais vous remercier, chers amis, de venir nous soutenir en cette fin de l’année académique. Votre amitié et vos prières nous sont extrêmement précieuses. Votre soutien nous est vraiment nécessaire. Sachez que vous êtes toujours dans nos cœurs et dans nos prières. Puisse le Seigneur nous bénir tous. Puisse-t-il, par les prières de sa Mère très pure, de saint Martin le Confesseur, de sainte Geneviève de Paris, garder dans la paix ce séminaire et le faire grandir pour le bien de l’Église du Christ.
Hiéromoine Alexandre Siniakov, recteur du Séminaire.