Homélie le dimanche 9 septembre 2012: le festin des noces du Fils du Roi



Homélie le dimanche 9 septembre 2012: le festin des noces du Fils du Roi
De l'Evangile selon saint Matthieu (Mt 22, 1-14): Le Seigneur dit cette parabole : Il en va du Royaume des cieux comme d’un roi qui fit un festin de noces pour son fils. Il envoya ses serviteurs appeler à la noce les invités. Mais eux ne voulaient pas venir. Il envoya encore d’autres serviteurs chargés de dire aux invités : « Voici j’ai apprêté mon banquet ; mes taureaux et mes bêtes grasses sont égorgés, tout est prêt, venez aux noces. » Mais eux, sans en tenir compte, s’en allèrent, l’un à son champ, l’autre à son commerce ; les autres, saisissant les serviteurs, les maltraitèrent et les tuèrent. Le roi se mit en colère ; il envoya ses troupes, fit périr ces assassins et incendia leur ville. Alors il dit à ses serviteurs : « La noce est prête, mais les invités n’en étaient pas dignes. Allez donc aux places d’où partent les chemins et convoquez à la noce tous ceux que vous trouverez. » Ces serviteurs s’en allèrent par les chemins et rassemblèrent tous ceux qu’ils trouvèrent, mauvais et bons. Et la salle de noces fut remplie de convives. Entré pour regarder les convives, le roi aperçut là un homme qui ne portait pas de vêtement de noce. « Mon ami, lui dit-il, comment es-tu entré ici sans avoir de vêtement de noce ? » Celui-ci resta muet. Alors le roi dit aux servants : « Jetez-le, pieds et poings liés, dans les ténèbres du dehors : là seront les pleurs et les grincements de dents. » Certes, beaucoup sont appelés, mais peu sont élus.



La parabole que nous venons d’entendre montre, frères et sœurs, que l’invitation qui nous est faite par Dieu, notre Créateur, est aussi gratuite qu’elle est exigeante. La multitude des êtres humains est appelée à prendre part aux noces du Fils de Dieu, mais tous ne seront pas dans l’état qu’exige un festin aussi extraordinaire. Tous nous sommes attendus au banquet eschatologique, mais nous devons nous y rendre dans des habits décents et convenables que réclame la participation à la table vivifiante de la Trinité elle-même.

Il ne faudrait pas nous offusquer, chers amis, du fait que le Seigneur nous rappelle la nécessité d’être adéquatement parés pour le repas éternel du Royaume, il faudrait plutôt nous réjouir de savoir que tous – bons et mauvais, gentils et méchants – tous, nous sommes conviés, de façon totalement gratuite, aux noces du Verbe de Dieu, et tous nous avons le temps et les moyens de revêtir les habits appropriés en y rajoutant même quelques petits bijoux spirituels – fruits de l’amour actif pour Dieu et le prochain.

Quand saint Siméon le Nouveau Théologien – une grande figure de l’Eglise en Orient ayant vécu à la charnière du premier et du deuxième millénaire – relit cette parabole, il se laisse impressionner surtout par le choix de l’épouse pour le Fils unique de Dieu (choix qui n’est pas précisé dans la parabole, mais que la tradition patristique devine aisément) et admire l’extrême humilité et philanthropie du Père. « De qui prend-il la fille pour faire les noces de son Fils ? Vous voulez le savoir ? Mais la grandeur de sa condescendance déroute ma pensée ; je veux le dire et je tremble de le faire […]. C’est la fille de celui qui s’est révolté contre lui, de celui qui a commis meurtre et adultère, autant dire d’un meurtrier et d’un adultère qu’il s’est procurée à lui-même comme épouse ! Tu vois le caractère incomparable et indicible de sa bonté et de sa condescendance ! Tu vois l’excès de son amour pour les hommes ! Tu vois l’immensité de sa charité et de sa bienfaisance ! Apprends donc maintenant avec moi, qui que tu sois, toi qui as une haute opinion de toi-même, à t’abaisser, à modérer tes prétentions, à ne jamais t’élever au-dessus de personne, serais-tu même le plus impérial de tous les empereurs, plus illustre que les sommités, plus riche que tous les riches, lorsque tu vois le Seigneur et Maître de l’univers, le Saint des saints, le Dieu bienheureux et seul souverain, celui qui habite la lumière inaccessible et plus qu’inexprimable, condescendre au point de se procurer la descendante du révolté comme épouse pour son Fils unique, pour l’invisible, l’incompréhensible, l’insondable, l’auteur et le créateur de l’univers, à cause de toi et de ton salut » (Ethique I, 9 : SC 122, p. 247-249).

Porter une robe nuptiale pour le jour où l’univers transfiguré et refaçonné célébrera le mariage du Verbe créateur avec l’Eglise son épouse n’est pas trop demander à ceux qui ont été comblés de tant de grâces par le Père céleste. Ce n’est pas lui qui fermera la porte de ce festin eschatologique devant ceux qu’il a aimés au point de les avoir purifiés par le sang de son Fils unique. Être à la table du Roi des siècles, cela ne vaut-il pas la peine de vendre tout ce qu’on possède pour n’acheter que ce vêtement et se présenter ainsi, en toute simplicité et humilité, devant Celui qui nous a faits et avoir part à sa joie et à son amour de Père ? Je vous souhaite, frères et sœurs, que vous ne vous souciez que d’une chose : vous procurer l’habit nuptial, cousu de charité, de foi et d’espérance, pour pouvoir demeurer éternellement au festin vivifiant du Fils auquel vous êtes conviés par le Père céleste.

Dimanche 9 Septembre 2012
Alexandre Siniakov